Alors que le photovoltaïque a connu une croissance sans précédent ces dernières années, le secteur traverse une période d’incertitude. Dans sa note d’analyse d’octobre 2025, l’ingénieur allemand Martin Schachinger (pvXchange) dresse un tableau contrasté d’un marché où les signaux économiques, politiques et technologiques se brouillent.
Les prix des modules solaires, toutes technologies confondues, évoluent sans tendance claire : certaines gammes augmentent, d’autres baissent, reflétant davantage l’état de la demande que des facteurs structurels. Le marché résidentiel est en net recul, tandis que les segments moyen et grand gabarit, plus compétitifs, concentrent désormais les ventes.
Mais le ralentissement pourrait s’accentuer à l’approche de 2026, sous l’effet de l’incertitude politique et de la disparition de nombreux modèles économiques. Ce fléchissement devrait logiquement entraîner une nouvelle baisse des prix, mais une décision récente de Pékin vient rebattre les cartes : la suppression des avantages fiscaux à l’export pour les fabricants chinois, qui renchérira les modules de près de 9 % en Europe. Les producteurs, déjà au seuil de rentabilité, n’auront d’autre choix que de répercuter cette hausse.
Le retour du fossile sous prétexte de pouvoir d’achat
Sur le plan politique, Schachinger dénonce une régression inquiétante : face au coût de la transition énergétique, de nombreux gouvernements renouent avec les énergies fossiles et nucléaires pour « soulager » les ménages. Une stratégie qu’il juge « absurde » et contraire aux données scientifiques.
En Allemagne, les recommandations des experts sont ignorées, et des projets de loi déjà décidés sous l’ère Peter Altmaier refont surface, freinant les renouvelables au profit des grands groupes historiques de l’énergie.
Cette politique, présentée sous couvert de « neutralité technologique », favoriserait en réalité la mise en place d’un marché de capacité, mécanisme taillé pour les grandes centrales pilotables, au détriment des producteurs décentralisés. Selon Schachinger, les outils pour équilibrer le système à moindre coût — stockage, pilotage intelligent, autoconsommation — existent déjà, mais restent sous-utilisés faute de volonté politique.
Un risque de retour en arrière
Le gouvernement allemand envisage même de supprimer la prime d’injection garantie pour les petites installations photovoltaïques, mesure qui pourrait déstabiliser tout le marché résidentiel.
« Sans source de revenu sécurisée, les modèles alternatifs doivent au moins être facilités, faute de quoi le marché s’effondrera », avertit Schachinger, qui plaide pour un seuil de maintien du tarif garanti à 30 kW.
Enfin, l’expert alerte sur le détournement possible du Fonds pour la protection du climat et la transformation, dont une partie pourrait financer de nouvelles centrales à gaz couplées à la capture de carbone. Une dérive « catastrophique », selon lui, qui détournerait des fonds publics destinés au solaire et à l’éolien vers des technologies « présentées à tort comme vertes ».





