jeudi, octobre 9, 2025
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Système électrique et autoconsommation : vers une cohabitation maîtrisée

À l’occasion de l’Université de l’autoconsommation d’Enerplan, une table ronde a réuni d’éminents spécialistes du secteur pour débattre des solutions nécessaires pour adapter le système électrique à l’explosion de l’autoconsommation. Parmi les intervenants figuraient Michel Gioria (Directeur général du SERCE), Yannick Jacquemart (Directeur Transformation de l’Exploitation du Système électrique et Intégration des Flexibilités chez RTE), Amaury Korniloff (Vice-président d’Enerplan, en charge flexibilité et stockage, et investisseur chez ZE ENERGY), et Elika Saidi Chalopin (Directrice Adjointe Technique au CONSUEL).

Un système en mutation nécessaire

L’introduction, menée par Michel Gioria, a posé le cadre : à mesure que l’autoconsommation se répand, le réseau électrique doit évoluer. Il a mis en avant les défis que cela engendre pour les électriciens indépendants : « Si l’on veut garantir sécurité, qualité de service et stabilité du réseau, il faut revoir les mécanismes de pilotage, les contraintes de raccordement et la coopération avec les acteurs renouvelables. » Pour le SERCE (syndicat des entreprises de l’électricité, du génie climatique et des énergies renouvelables), la priorité est de développer une culture technique de l’intégration des énergies distribuées, notamment via les smart grids, la digitalisation, et une meilleure coordination avec les réseaux locaux.

RTE : piloter la flexibilité pour stabiliser l’équilibre

Yannick Jacquemart a ensuite présenté la feuille de route de RTE — le gestionnaire du réseau de transport français — pour l’adaptation à un système électrique de plus en plus décentralisé. Il a insisté sur le rôle central de la flexibilité : batteries, pilotage de la demande, effacement (réduction ponctuelle de la consommation), hydrogène, etc. Selon lui, « l’autoconsommation ne doit pas être un élément perturbateur, mais une composante intégrée du réseau », à condition qu’elle soit orchestrée correctement. Il a également évoqué les expérimentations en cours (agrégateurs, plateformes de flex) qui permettront de faire dialoguer producteurs, consommateurs et réseaux dans un écosystème coordonné.

Le point de vue de la filière solaire : stockage et marché

Prenant la parole à son tour, Amaury Korniloff a souligné que l’autoconsommation, pour devenir un levier réel, doit s’accompagner d’outils de stockage et de marché de flexibilité. Selon lui, les modèles économiques existants ne suffisent pas encore à rémunérer les services du stockage, qui valorisent l’électricité sur des périodes critiques. Il a plaidé pour des incitations réglementaires, une tarification du réseau plus fine, et des mécanismes de compensation entre producteurs-consommateurs. En tant qu’investisseur, il a souligné que la filière a besoin de visibilité sur les règles du jeu pour mobiliser davantage de capitaux.

CONSUEL : garantir la sécurité dans un contexte nouveau

Elika Saidi Chalopin, pour le CONSUEL (organisme en charge de la conformité des installations électriques en France), a abordé un pan souvent moins discuté : la sécurité et la conformité des installations d’autoconsommation. Elle a rappelé que les installations photovoltaïques, lorsqu’elles sont raccordées, doivent respecter des normes strictes pour éviter les risques électriques et assurer la compatibilité avec le réseau. Dans un contexte où de nombreux petits producteurs apparaissent, le CONSUEL souhaite renforcer les contrôles, la formation et la normalisation pour éviter les défaillances.

Vers un système plus collaboratif

La table ronde a mis en lumière l’enjeu de la coopération systémique : pour que l’autoconsommation s’intègre harmonieusement, il faudra que les producteurs distribués, les gestionnaires de réseau, les fournisseurs d’énergie et les régulateurs concertent leurs actions. Le réseau ne peut plus être conçu comme une structure passive : il doit devenir interactif.

La conclusion est optimiste mais prudente : l’autoconsommation peut devenir un pilier de la décarbonation, mais cela exige des avancées réglementaires, technologiques, et une volonté forte de coordination. La mutation du système électrique est en cours — et l’autoconsommation n’est pas un défi isolé, mais un levier à intégrer dans la stratégie globale du réseau.

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